Big Data - Mégadonnées

 

Un regroupement de plus de 120 personnes dénonce ce mardi au tribunal de Paris l'usage qu'envisagerait de faire Enedis des données recueillies par les compteurs Linky

Plus de 120 personnes demandent ce mardi au tribunal de Paris des mesures conservatoires contre les compteurs électriques Linky «communiquants», en dénonçant notamment l'usage que la filiale indépendante de distribution d'EDF Enedis envisagerait de faire des données recueillies par ces appareils.

De nombreuses procédures du genre ont déjà été lancées. Mais ce type d'actions, qu'elles émanent de collectivités locales ou d'usagers, n'a guère été jusqu'ici couronné de succès. Les deux avocats des requérants espèrent franchir un premier pas vers une jurisprudence en faveur des consommateurs, si le juge des référés leur donne raison. «Si cette action prospère, ce sera un moyen pour ceux qui ne veulent pas de Linky chez eux de se placer sous la protection de la justice», explique ainsi Me Christophe Léguevaques.

Me Léguevaques et son confrère Arnaud Durand comptent notamment mettre en avant le fait qu'Enedis envisage d'utiliser sur une grande échelle les données captées grâce à ces compteurs de nouvelle génération. «Enedis est aujourd'hui un distributeur d'énergie mais ambitionne de devenir un courtier en information et un acteur du big data», explique Me Christophe Léguevaques. Un aspect de son activité qu'Enedis fait miroiter auprès des investisseurs, soulignent les deux avocats, qui s'appuient notamment sur un document de présentation de l'entreprise et sur une décision de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL). Dans le premier, Enedis souligne que si 35 millions de compteurs intelligents sont déployés en France, ils permettront notamment de recueillir, au rythme d'une mesure toutes les dix minutes, quelque 1.800 milliards de lignes de données par an et d'avoir une «vision 360 (degrés) du client».

Une collecte «particulièrement intrusive»

Dans sa décision du 5 mars 2018, la CNIL juge pour sa part «particulièrement intrusive» cette collecte de données «susceptibles de révéler des informations sur la vie privée des personnes concernées». Selon les deux avocats, pour «communiquer» et recueillir ces données, Enedis utilise des «courants porteurs en ligne» (CPL) générant des radiofréquences situées entre 35 et 95 kHz, qui transforment le circuit électrique des clients en antenne. Or, dans un avis de juin 2017, l'Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) recommande d'étudier la possibilité d'installer des filtres «permettant d'éviter la propagation des signaux CPL» dans les logements et fait état d'»incertitudes sur les effets sanitaires» des fréquences mises en œuvre, font valoir les deux avocats.

Ils dénoncent enfin le fait que l'«évaluateur officiel» du compteur Linky, le groupe Capgemini, ait été en quelque sorte juge et partie dans cette affaire. Cette entreprise de conseil dans la haute technologie a recommandé à la Commission de régulation de l'énergie (CRE) de poursuivre le déploiement de ces appareils. Mais elle s'est aussi vue confier en 2011 deux contrats liés au déploiement de Linky par ERDF, devenue Enedis en 2016: l'un d'assistance à maîtrise d'ouvrage, l'autre de maîtrise d'œuvre, expliquent Me Léguevaques et Durand.

Ils demandent notamment au tribunal d'enjoindre à Enedis de ne pas installer de compteur Linky chez leurs clients, de leur fournir une électricité exempte de tout courant CPL et de leur communiquer toutes une série d'informations, notamment sur la nature des données collectées par cet appareil.


Date de création : 27/02/2019 14:44
Catégorie : - Cybersécurité
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